Entretien exclusif avec Serge Berdugo, Secrétaire général du Conseil de la communauté israélite du Maroc
Serge Berdugo, en tant que Secrétaire général du Conseil de la communauté israélite du Maroc, est l’une des figures les plus influentes dans la préservation du patrimoine juif marocain. Il œuvre sans relâche à la protection de ce patrimoine tant au niveau national qu’international. Au cours de cet entretien exclusif accordé à ALM, il évoque les multiples projets entrepris pour valoriser le judaïsme marocain à travers le monde et partage son attachement profond au Maroc. Il revient également sur l’état actuel du patrimoine juif de Casablanca, les spécificités du judaïsme marocain, et les relations solides entre la diaspora juive marocaine et le Royaume.
L’état des lieux du patrimoine juif à Casablanca
Berdugo commence par rappeler que la ville de Casablanca est relativement jeune, avec une communauté juive installée seulement à partir des années 1900. Contrairement à Tanger, où des bâtiments remontent au 17ème siècle, Casablanca ne compte que quelques monuments juifs historiques, tels que la synagogue Beth El, l’ancien cimetière fermé en 1947, et certaines écoles datant des années 1945-1950. Il mentionne également des synagogues comme Hazan et Ettedgui, restaurées dans le cadre de l’embellissement de la médina de Casablanca. En parallèle, plusieurs synagogues continuent d’assurer des fonctions religieuses quotidiennes, mais elles ne sont pas toutes considérées comme des monuments historiques.
La question de la propriété des synagogues
Berdugo explique qu’il existe deux types de synagogues à Casablanca : celles appartenant à la communauté, comme Beth El, et celles appartenant à des particuliers, comme la synagogue Ettedgui qui a été construite par la famille éponyme.
Nombre de Juifs marocains à Casablanca
La communauté juive de Casablanca se compose d’environ 3.000 membres, tandis qu’il y aurait environ 3.500 Juifs marocains à travers tout le pays. Il évoque les écoles, les services de santé et les restaurants casher qui témoignent de la vitalité de cette communauté, malgré sa petite taille. Il souligne l’exception marocaine, comparant Casablanca à d’autres villes comme Strasbourg ou Istanbul, où les services casher sont moins nombreux.
La spécificité du judaïsme marocain
Serge Berdugo met en lumière la fusion unique du judaïsme marocain, qui résulte de la rencontre de deux courants : les Tochavim, les Juifs d’origine berbère, et les Megorashim, les expulsés d’Espagne en 1492. Après des siècles de coexistence, ces deux communautés ont formé une identité juive marocaine distincte, imprégnée des traditions berbères, notamment à travers les pèlerinages et les hiloula.
La diaspora juive marocaine et son lien avec le Maroc
La diaspora juive marocaine, malgré sa dispersion à travers le monde, conserve un lien indéfectible avec le Maroc. Selon Berdugo, après plusieurs générations, ce sentiment d’appartenance au Maroc reste très fort, qu’ils résident en Israël, en France, au Canada ou ailleurs. Cet attachement profond se manifeste par une volonté de préserver et valoriser le patrimoine juif marocain, que ce soit à travers des initiatives culturelles ou en maintenant des liens sociaux avec leur pays d’origine.
Questions ouvertes à réflexion :
- Comment le Maroc pourrait-il renforcer davantage son rôle de pont culturel entre ses communautés juives nationales et diasporiques ?
- Quelle place les autorités marocaines devraient-elles accorder à la revalorisation du patrimoine juif dans les projets de rénovation urbaine à Casablanca et au niveau national